L'épisode de la grippe A - H1N1 était sans doute l'occasion d'expérimenter les enseignements tirés des carences ancestrales de la France dans le domaine de l'information du public en ce qui concerne la prévention.
Sur le plan de l'anticipation rien à dire, voici plusieurs mois que le sujet fait la une de la presse. Mais sur celui de l'information qu'en est-il ? Prévenir c'est en effet anticiper le risque et mettre en place un dispositif d'éducation de la population pour en limiter les effets. Or, le flot d'informations, parfois contradictoires, que nous subissons depuis des semaines n'est mu que par le délétère principe de précaution. On nous livre ainsi d'un bloc toutes les mesures à prendre quelque soit l'avancée de l'épidémie, en amalgamant les procédures de prévention et celles du soin. On communique sur le sujet, on se disculpe d'éventuelles responsabilités, mais on ne fait toujours pas de prévention. Sur le terrain, les médecins constatent le trouble de la population. Sans message clair, adapté et progressif, il est difficile de créer un sentiment collectif indispensable face à un tel risque. Naîssent alors, indiciblement, des réactions individuelles de peur. Ainsi du masque au vaccin, du Tamiflu à la solution hydro-alcoolique, chacun cherche pathétiquement à stocker. Parallèlement, d'aucuns commencent à douter. Le vaccin n'est-il pas dangereux ? Le médicament n'est-il pas délétère pour la femme enceinte ? Et cette pandémie n'est-elle pas une manière de nous occuper ou de nous faire consommer... La rumeur est de nouveau en marche et les travers français dans le domaine de la santé publique toujours pas dépassés.
Mais que faudrait-il faire alors ? Sans aucun doute tenir compte du risque, mais en respectant la population. Oui le risque d'épidémie grave existe, même s'il est faible. Les généralistes que nous sommes, connaissent bien cette notion de risque faible mais pas nul. Des maux de tête peuvent être une simple migraine ou une tumeur maligne. Quel impact sur les patients aurait la prescription d'un scanner systématique devant toute céphalée ? En revanche, nous évoquons les risques en cas de persistance.
Certain d'entre nous ont décidé de faire un bulletin d'information hebdomadaire daté, affiché dans la salle d'attente, pour donner des informations adaptées au moment présent. A ce jour, l'effort est mis sur les mesures simples d'hygiène (couvrir la bouche quand on tousse et ne plus cracher au sol) et non l'achat de solution hydroalcoolique ou de masque. Une description des symptômes de la grippe est aussi affichée. L'idée est de tenter de bien marquer la différence entre les mesures à prendre en général et celles en cas de maladie ou de contact direct avec un malade.
Pour le moment on se retrouve plutôt dans une situation où chacun sortirait tous les jours, parapluie ouvert en plein soleil, en attendant l'orage qu'on nous annonce dans quelques semaines ! Il y aura peut être des effets boomerang de cette information non hiérarchisée au moment d'évaluer son efficacité. Et il n'est pas certain que la démarche santé publique en sera facilitée.
Olivier KANDEL
Contact par e.mail
Sur le plan de l'anticipation rien à dire, voici plusieurs mois que le sujet fait la une de la presse. Mais sur celui de l'information qu'en est-il ? Prévenir c'est en effet anticiper le risque et mettre en place un dispositif d'éducation de la population pour en limiter les effets. Or, le flot d'informations, parfois contradictoires, que nous subissons depuis des semaines n'est mu que par le délétère principe de précaution. On nous livre ainsi d'un bloc toutes les mesures à prendre quelque soit l'avancée de l'épidémie, en amalgamant les procédures de prévention et celles du soin. On communique sur le sujet, on se disculpe d'éventuelles responsabilités, mais on ne fait toujours pas de prévention. Sur le terrain, les médecins constatent le trouble de la population. Sans message clair, adapté et progressif, il est difficile de créer un sentiment collectif indispensable face à un tel risque. Naîssent alors, indiciblement, des réactions individuelles de peur. Ainsi du masque au vaccin, du Tamiflu à la solution hydro-alcoolique, chacun cherche pathétiquement à stocker. Parallèlement, d'aucuns commencent à douter. Le vaccin n'est-il pas dangereux ? Le médicament n'est-il pas délétère pour la femme enceinte ? Et cette pandémie n'est-elle pas une manière de nous occuper ou de nous faire consommer... La rumeur est de nouveau en marche et les travers français dans le domaine de la santé publique toujours pas dépassés.
Mais que faudrait-il faire alors ? Sans aucun doute tenir compte du risque, mais en respectant la population. Oui le risque d'épidémie grave existe, même s'il est faible. Les généralistes que nous sommes, connaissent bien cette notion de risque faible mais pas nul. Des maux de tête peuvent être une simple migraine ou une tumeur maligne. Quel impact sur les patients aurait la prescription d'un scanner systématique devant toute céphalée ? En revanche, nous évoquons les risques en cas de persistance.
Certain d'entre nous ont décidé de faire un bulletin d'information hebdomadaire daté, affiché dans la salle d'attente, pour donner des informations adaptées au moment présent. A ce jour, l'effort est mis sur les mesures simples d'hygiène (couvrir la bouche quand on tousse et ne plus cracher au sol) et non l'achat de solution hydroalcoolique ou de masque. Une description des symptômes de la grippe est aussi affichée. L'idée est de tenter de bien marquer la différence entre les mesures à prendre en général et celles en cas de maladie ou de contact direct avec un malade.
Pour le moment on se retrouve plutôt dans une situation où chacun sortirait tous les jours, parapluie ouvert en plein soleil, en attendant l'orage qu'on nous annonce dans quelques semaines ! Il y aura peut être des effets boomerang de cette information non hiérarchisée au moment d'évaluer son efficacité. Et il n'est pas certain que la démarche santé publique en sera facilitée.
Olivier KANDEL
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